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3 jours de trek mémorables à Sa Pa

3 jours de trek mémorables à Sa Pa

Nous arrivons vers 18h à Sapa, petite ville perdue dans la montagne vietnamienne. Après un passage de frontière plus que facile, nous avons marché 25 minutes jusqu’à la gare routière de Lao Cai puis pris un minibus jusqu’à Sa Pa.

Gare de Sapa
Gare de Sapa

Nous dormons au Happy family hôtel tenu par un vietnamien qui parle très bien français. Il nous fait goûter un bouillon avec du porc et des vermicelles de riz. Un délice ! Le lendemain, ce sont des crêpes et un bon café qui nous attendent pour le petit déjeuner. Nous sommes attendus à 8h30 à l’agence Ethos pour un trek de 3 jours dans la région montagneuse de Sa Pa.

Sapa

Après un malentendu, nous arrivons avec 10 min de retard à l’agence. Le patron de l’hôtel nous avait assuré que l’agence était à 500 mètres de chez lui et elle se trouvait en fait à plus de 3km ! Malgré notre retard, nous sommes très bien accueillis par une belle vietnamienne au long cheveux noirs. Le salon d’Ethos est rempli de futurs randonneurs qui nous attendent sagement en sirotant un thé. La jeune femme nous propose un thé également et celui-ci s’avère être un breuvage plein de saveurs. Il est aromatisé à la cardamome et à la cannelle.

Cardamone dans les rues de Sapa
Cardamone dans les rues de Sapa

Un homme prend ensuite le relais pour nous expliquer l’origine de la renommée de la région et surtout le contexte dans lequel vivent les minorités au Vietnam. Nous apprenons entre autre que le train est arrivé à Sapa grâce aux français qui voulaient non pas permettre aux gens d’accéder au sanatorium mais en réalité pour pouvoir acheminer l’opium de la région à Hanoï. Concernant les minorités vivant dans les alentours, elles sont stigmatisées. Leurs enfants doivent aller dans des écoles qui leur sont réservées, il ne vont pas avec les autres vietnamiens. Ils n’ont pas école l’après midi pour pouvoir aider aux champs sauf que les 3/4 de l’année leur présence n’est pas nécessaire dans les champs et quand elle est nécessaire, en septembre, les enfants manquent alors toute la journée. Les élèves passent le même examen à la fin de l’année alors que leur temps de cours est divisé par deux. Les autres vietnamiens apprennent une deuxième langue à l’école (l’anglais) et non les minorités ce qui limite encore leurs chances de s’en sortir. L’anglais est très important dans une région comme Sa Pa puisqu’elle permet ensuite de vivre du tourisme.

À la base, certaines de ces minorités étaient des peuples nomades qui changeaient de lieu de vie lorsque les ressources (gibiers et terres) étaient épuisées. Lorsque les colons sont arrivés, ils ont décidé que chaque tribu devait se sédentariser afin de pouvoir mieux contrôler la production de pavot et donc d’opium. Ils ont ainsi créé la pauvreté dans ces régions. Les hommes ne pouvant plus bouger les ressources naturelles se sont épuisées et la famine a commencé.

Nous apprenons qu’une personne a besoin de 400 kg de riz par an et que la plupart du temps la production des familles n’est pas suffisante. Ils doivent alors acheter la nourriture manquante mais elle est trop chère pour eux (leur seule source de revenus est le riz). Ils vont donc chasser tout ce qu’ils trouvent (souris, rats, chiens, et avant leur disparition sangliers et cerfs) pour subvenir à leurs besoins. C’est pour cette raison qu’ils ont été surnommés par certains vietnamiens les « Cats people » littéralement peuple-chat. Cette appellation est très péjorative, c’est un peu comme le terme nègre chez nous.

Marché de Sapa
Marché de Sapa

Après toutes ces explications c’est avec Phang (prononcer Pam), appartenant au peuple Hmong que nous partons. Elle sera notre guide personnel pendant 3 jours. Elle a 27 ans, elle est mariée et a deux garçons de 7 et 5 ans. Son mari est absent pour une semaine. Il est parti récolter de la cardamome dans les montagnes et devra ensuite la faire sécher avant de la redescendre pour en amoindrir le poids.

Nous commençons la journée par une visite du marché local. Le repas de midi sera acheté ici. Il est composé de poulet, poivrons, tomates, et d’autres légumes que nous n’avons pas en France. En dessert, ce sera mangue, prunes et un autre fruit inconnu au bataillon qui a un léger goût de melon. Un vrai festin !

Du chien sur les étals
Du chien sur les étals

Nous marchons à travers les rizières. Nous suivons des cours d’eau. Nous cheminons seuls dans les montagnes de Sapa loin du flots de touristes. Pour le déjeuner, nous nous arrêtons chez la tante de notre guide. Ses cousins sont là et nous préparons le repas ensemble. Nous sommes étonnés de voir la facilité avec laquelle tout le monde manie le couteau de 30 cm ou la machette pour couper ou éplucher les légumes. Le repas se fait avec des baguettes. Ce n’est pas un problème pour nous, je vous rappelle qu’on vient de Chine !

Les familles des villages alentours sont très pauvres. Les habitants ont quelques cochons et poules et se nourrissent principalement de riz. Ils ne sont pas éduqués au respect de la nature et les déchets sont souvent laissés au bord de la route et au mieux brûlés ou enterrés. Au niveau de l’hygiène c’est la même chose, ils ne savent pas tous utiliser une brosse à dent. Certaines familles envoient les enfants vendre des souvenirs aux touristes à Sapa plutôt que d’aller à l’école. Ce n’est pas leur rendre service que de leur acheter leur marchandise car les parents en déduisent qu’ils peuvent en tirer un revenu et obligent les enfants à abandonner l’école pour gagner quelques dongs supplémentaires (monnaie vietnamienne).

Notre après-midi se poursuit avec le brouillard mais cela n’entame en rien notre enthousiasme. Phang est une guide merveilleuse qui répond à toutes nos questions. Nous discutons ensemble du mariage et des traditions. Elle nous explique qu’ici on ne porte pas de robe blanche mais un costume traditionnel très coloré. Aucun signe distinctif ne montre que vous êtes marié. Le problème dans ces populations très proches de la frontière chinoise, ce sont les kidnappings très fréquents. En effet, la politique de l’enfant unique en Chine a créé un déséquilibre homme/femme en faveur des hommes. Le kidnapping des femmes dans ces régions reculées est donc malheureusement fréquent. Elles sont vendues en Chine et disparaissent à jamais.

Notre dernière étape de la journée sera la maison de notre hôte qui nous accueille chez elle pour la nuit. Le repas est préparé ensemble et nous servirons ce soir là des rouleaux de printemps. Le dîner sera très copieux et nous finirons celui-ci en goûtant la happy water qui n’est autre que l’eau de vie locale, faite à base de riz bien sûr ! Ça ressemble à de la vodka mais c’est encore plus fort.

Pour cette nuit, pas de douche et les toilettes sont à l’extérieur de la maison. Pour nous, ce n’est rien par rapport à la joie que cette journée nous a apportée et la chance de découvrir le quotidien de la famille de Phang.

Avec Pam, une guide exceptionnelle
Avec Phang, une guide exceptionnelle

La nuit est très agitée. Les cochons nous réveillent à 3h du matin puis c’est le tour du coq vers 5h et enfin le chiot qui réussit à ouvrir la porte de la chambre et fait un boucan de tous les diables vers 6h30.

Nous préparons le petit déjeuner ensemble. Pommes de terre, riz, viande et salade le composent. Nous partons ensuite en direction de la maison de son oncle chez qui nous déjeunons. Les enfants sont là. Nous sommes dimanche mais ils sont tellement timides qu’ils ne veulent pas manger avec nous. Nous préparons le repas et une grande pause s’en suit. La randonnée étaient plutôt difficile ce matin car le terrain était très glissant et boueux. Il pleut régulièrement dans cette région du pays ce qui ne facilite pas la vie des randonneurs.

L’après-midi, la marche sera plus courte et c’est chez le frère de sa mère que nous passerons la nuit. Les enfants sont là et notre premier réflexe sera de leur proposer de jouer à un jeu ensemble. 1.2.3 soleil semble leur plaire même si la compréhension des consignes n’est pas si évidente que ça au premier abord. Heureusement, Phang joue les interprètes et nous apprend également un jeu auquel ils jouent régulièrement. Nous finissons par un cache-cache à se perdre entre les enclos à cochons ou à se faire oublier sous un parapluie. Mais quelle idée ?!

La nuit tombe et le repas est prêt. Comme le jour précédent, le repas sera en partie composé de rouleaux de printemps, d’une variété d’épinards cuits et de riz bien sûr ! Après le repas, les Hmongs sortent la Happy water. Vous savez l’eau-de-vie locale! Un verre puis deux puis cinq… Tout le monde rit, et oui ça rend happy ! Nous leur chantons nos chansons franchouillardes et leur faisons une petite démonstration de rock en échange de leurs chants et et leurs danses. Les enfants nous montrent une chorégraphie apprise à l’école et les mamans très timides finissent par entonner leur chant traditionnel. Cette soirée restera le meilleur moment de notre trek.

Lorsqu’il est l’heure d’aller se coucher, la famille s’excuse de ne pas avoir suffisamment de lits pour nous. Ce n’est pas un problème pour nous. Phang nous avait prévenu que si nous choisissions de dormir ici les toilettes seraient dans la jungle et notre lit une paillasse au sol. Nous ne regrettons pas notre choix au vu de la soirée que nous venons de vivre.

La nuit sera encore plus courte et agitée. Le sol et l’air sont très humides. Les animaux font beaucoup de bruit, sans parler de l’orage qui éclate peu après notre coucher. Malgré l’alcool nous dormons très peu.

Le lendemain, fatigués nous faisons le choix de faire une randonnée plus courte et de manger dans un petit restaurant. La fatigue et la boue sur le chemin ne nous facilitent pas le trajet. Nous peinons à avancer. Arrivés au village principal, nous sommes accostés par des petites filles chargées de bracelets et de sacs brodés. Elles nous suivent sur des dizaines de mètres malgré nos réponses négatives. Au bout d’un certain temps agacée, je lâche un « non » ferme mais efficace. On aimerait tellement pouvoir leur dire d’aller à l’école…

Une famille sur le bord du sentier
Une famille sur le bord du sentier

Nous déjeunons ensuite dans un petit restaurant avec une vue magnifique sur les rizières. La pluie recommence à tomber et nous marchons une demi-heure pour rejoindre le bas du village où nous prenons un taxi pour Sapa.

La vue du resto
La vue du resto

Arrivés à Ethos, on nous offre un thé et on nous propose de prendre une douche bien méritée après 3 jours de randonnée. Nous quittons notre guide avec tristesse et promettons de lui envoyer des photos des plus beaux moments vécus ensemble.

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